"Rien n'est plus sot que de traiter avec sérieux des choses frivoles ; mais rien n'est plus spirituel que de faire servir la frivolité à des choses sérieuses." Erasme.
Depuis des siècles, les Français se considèrent volontiers comme le peuple le plus inelligent de la terre. Mais nous sommes menacés très gravement menacés d'un déripage ( mélange de dérapage et de dérive ) de notre intelligence sociale et individuelle, vers une connerie irrépressible, qui se propagerait comme une épidémie. Il faut donc s'en préoccuper rapidement ! Malgré les apparences du débat, l'incorrection familière du titre et l'incongruité du sujet, il s'agit d'une réflexion sérieuse qui, malheureusement, ne peut pas se couper d'un humour grinçant voire caustique et d'une dérision amère.
Cet éloge sera centré sur ce qu'on appelle maintenant l'Hexagonie, fief communautaire qui était auparavant la France.
" Deux choses sont infinies : l'univers et la stupidité humaine. Et encore pour l'univers, je n'en suis pas sûr !" Albert Einstein.
Le mot connerie ne figurait pas dans le Larousse du XX° siècle en six volumes, non pas parce qu'elle n'existait pas, mais parce qu'on ne parlait pas de ces choses là à cette époque ! Par contre, le petit Robert stipule que c'est une imbeccilté, une absurdité.
"Quelle connerie la guerre !" Prévert.
La connerie triomphe dans le langage courant actuel. Mort aux cons ! Quel con ! Que je suis con ! Bernard Tapie considérait que la désignation de Ségolène Royal comme candidate du Parti Socialiste à la Présidence de la République était une " énorme connerie". Ce bon mot l'a ultérieurement bien servi. Dans l'insulte, on charge la terminaison pour accentuer l'effet délétère : va donc, connard ! Dégage connasse ! Une formule présidentielle a fait florès : " Casse-toi pauv' con ! Se couper des pauvres et des cons, cela fait beaucoup pour un politicien. En effet, en démocratie, ce sont les plus nombreux qui gagnent, ce qui laisse une bonne chance aux cons car ils sont nombreux !
Des politiciens astucieux mais en manque d'électeurs pourraient créer le plus grand parti de l'Hexagonie, qui s'appelerait: Vive les cons ( VLC ). Succès électoral assuré !
Un bouquiniste parisien du nom de Georges Filloux a écrit dans les années 2000 un petit livre sur le sujet : "Pour une dialectique de la connerie". Le bouquiniste et le bouquin sont devenus introuvables, mais les cons prolifèrent.
La connerie est la caractéristique des cons. Ce peut être une erreur ou une faute de pensée, une action ou une décision erronnée ou prise à contretemps, qui aboutit à un résultat néfaste, mauvais, pitoyable, catastrophique...mais aussi par extension c'est une caractéristique éventuelle d'un être humain ou d'un groupe d'êtres humains. Voire une insulte !
Une connerie est intuitivement claire dans les approches objectives de la réalité. C'est une incapacité à comprendre un raisonnement ou à se comporter logiquement. C'est alors le contraire de l'intelligence. Dans ce domaine, si le cerveau humain peut déraper, déconner et se tromper, la réalité nous rappelle rapidement à l'ordre.
Plus difficile est de qualifier la connerie lors de l'approche de problèmes qui touchent aux rapports iner-humains. Jacques Chirac, en 2005, au Salon de l'Agriculture affirmait : " voter non au référendum sur la Constitution européenne serait une connerie !" Et pourtant la sacro-sainte majorité démocratique a choisi la connerie ! Ce qui n'a pas empêché les députés de la contredire quelques mois plus tard.
"Si tous les cons volaient, il ferait constament nuit !" confirmait San Antonio. Depuis la nuit des temps, il semble établi que les cons sont plus nombreux que les non-cons. Oui ! Mais comment les détecter ?
Une réplique de l'excellent film " Les tontons flingueurs" va nous aider : " les cons, ça ose tout. C'est même à ça qu'on les reconnaît." Signé Audiard.
Il y a tout un continuum dans la connerie. Elle n'obéit pas à la loi du tout ou rien : je suis con ou non. On est plus ou moins con, en fonction du temps que durent nos épisodes de connerie et de leur gravité par leurs conséquences.
En plus, tout n'est pas quantifiable, mesurable, dans la nature. Il faut admettre un côté qualitatif à beaucoup de choses, c'est ce qu'on appelle la performance d'un sportif, d'un artiste, d'un chirugien... Même la connerie doit doit garder un aspect qualitatif.
La notion de connerie n'apparaît objectivement parfois que bien des années après qu'une décison malheureuse l'ait engendrée. Il faut savoir s'imposer une suspension temporaire du jugement sur la connerie. Les soi-disant "sciences" humaines sont un terreau très favorable à l'éclosion de beaucoup de conneries. Sciences politiques ( Science Po ) en est un exemple criant : la politique n'a jamais été une science !
Dans le domaine artistique, c'est encore plus net. Il s'agit d'irrationnel, d'imaginaire où tout est permis, rien n'est vérifiable par une démarche logique de type scientifique. Tout est permis ! Selon le relativisme : tout se vaut ! Ah ! Bon.
Quelques caractéristiques de la connerie individuelle sont remarquables :
elle est en général involontaire, par ignorance, par désinvolture, par viciation de la pensée. Les cons utilisent volontiers des schémas de pensée automatique : la pensée à tiroir. En médecine, cela donne l'absurdité : diarrhée = diarsed ! Ils se laissent aussi enfermer dans la pensée en tunnel qui consiste à ne pas savoir sortir d'une idée si elle s'avère mauvaise et fuir en avant en négligeant tous les signaux qui vont contre cette idée. Ils adorent la pensée panurgienne : penser comme les autres cela les rassure. A l'opposé, la pensée contrarienne est plus élitiste mais son emploi systématique peut devenir irritant par son côté systématique.
La connerie volontaire est plus grave, souvent réservée aux esprits tordus ; elle confine au banditisme.
La connerie individuelle peut être aigue et transitoire ou chronique et lancinante. En fait, il faut apprendre à vivre avec la connerie : elle est partout !
La connerie sociale est contagieuse. L'actualité nous montre régulièrement que, comme les moutons de Panurge,les hommes réunis en foule peuvent agir de la façon la plus stupide qui soit.
"Quand un homme se noie, il se raccroche même à un serpent." Proverbe arabe.
La connerie ne disparaît pas avec l'éducaion. Au contaire, elle s'organise.Elle se déplace et se transforme. Elle se dissimule souvent derrière un verbiage incompréhensible. Malheureusement l'éducation donne souvent plus de moyens à sa connerie pour se manifester. Le bon peuple est humble, il connait ses limites, les accepte et suspend son jugement ou en change. L'elite ne se permet pas d'hésiter. Ce serait un signe de faiblesse : elle doit avoir la vérité sur le bout de la langue dans l'instant, la science infuse, la solution à tout.
Un dicton aéronautique affirme que "lorsqu'une connerie est possible, il y aura un jour ou l'autre un con pour la faire." il faut donc créer des systèmes où la connerie est impossible. Difficile, camarade !
Je me trouve moi-même parfois assez connard et nous sommes tous, à un moment ou à un autre, des connards.
L'appréciation de la connerie est subjective. Ce sont les autres que l'on trouve cons, en général. Il faut faire un effort, pénible, d'objectivité pour évaluer son degré de connerie personnelle. On pourrait envisager de définir des critères de connerie, mais ils sont si nombreux... Certains endroits stimulent la connerie : la circulation sur les routes en voiture, les stades de foutebol, les podiums des manifestations politiques, les parades qu'elles soient techno, gaies ou autres. Pas de réflexion, des slogans. Le panurgisme joue un rôle aggravant car au delà d'une certaine masse critique de connerie se développe une véritable contagion sociale. Les manipulations des foules sont devenues des techniques bien codifiées.
Notre connerie évolue dans le temps pour chacun d'entre nous, en bien ou plus souvent en mal. On devient un vieux con ! mais certains jeunes partent avec de l'avance ! Le dicton italien :" la madre degli cretini é sempre incinta." pourrait se traduire par : tant qu'il y aura des hommes, il y aura des cons !
Finalement, un con c'est quelqu'un qui n'est pas d'accord avec nous !
Fin du délire, merci de l'avoir suivi jusqu'au bout.
le livre est de 1964
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